Sur la route vers AGRA
Au bord de l'autoroute vers Agra, nous nous arrêtons pour visister un temple (récent) très coloré, qui plait beaucoup au car de touristes américains qui se trouvent là .
Beaucoup plus ancien et intéressant à mon avis, est ce temple "escalier", en pleine campagne, au milieu d'un tout petit village.
Le guide m'explique qu'à la période des moussons, les trois étages du bas sont remplis d'eau. A droite il y avait l'endroit pour les ablutions: les hommes d'un côté, les femmes de l'autre. Ils cherchaient l'eau au fond avec des seaux attachés à des cordes. Le temple a survécu aux islamistes qui ont tout détruit autour, cassant toutes les statues des divinités hindoues ainsi que le temple d'à côté dont il ne reste que des ruines.
Pas loin du temple, je suis intrigué par le travail d'une femme en bordure de la petite route. Elle fabrique des galettes de combustible à base de bouses de vaches, chameaux et autres animaux. Le mélange est savant, le geste est précis et tout est fait à la main. Ensuite ces galettes sont mises à sécher un peu partout, notamment sur le bord des aires de service de l'autoroute ! Ce combustible est envoyé par charettes entières un peu partout dans le pays. On en croise sur l'autoroute.
Juste à côté, trois hommes très aimables viennent discuter avec le chauffeur qui s'est arrêté au moulin pour acheter de l'huile qui provient des cultures que l'on voit derrière.

Ils vont au temple, et ne font rien pendant que leurs femmes travaillent, me confie mon chauffeur.

Mais soudain il faut s'arrêter sur le bord de l'autoroute, un pneu est à plat ! Crevaison ou usure, il faut le changer. Tout aurait été très rapide si le cric de la voiture avait fonctionné. Non, il ne marche pas et heureusement Mr Singh, le chauffeur, a pu en emprunter un juste à côté, car nous avons pu nous arrêter près d'un endroit où l'on fabrique des briques. Cela aurait pu être aussi très rapide si la roue de secours n'avait pas été pas hors d'usage ! Mr Singh a dû porter sur l'épaule la roue à réparer, et disparaitre au loin vers je ne sais quel atelier qu'on lui a indiqué. Cela m'a laissé tout le temps pour visiter la briquetterie. Tout le monde était très accueillant et souriant. Aucun touriste n'a jamais dû s'arrêter ici, en pleine campagne.
Voilà des dizaines de milliers de briques crues (claires) et cuites (rouge) qui sont sans arrêt déplacées puis chargées sur des ânes, puis sur des remorques derrière des tracteurs que l'on retrouve sur l'autoroute jusqu'à Agra à plusieurs dizaines de kilomètres plus loin. On peut les suivre à la trace, car surchargées, les charettes laissent régulièrement tomber quelques briques très friables sur l'autoroute.
Le combustible (restes agricoles) est apporté dans ces grands sacs sur les charettes tirées par les chameaux, qui viennent des alentours à contresens sur l'autoroute ! Il passe à la pesée puis est déchargé au pied du four. Notez les traditionnelles galettes de merdes qui sèchent au soleil, comme un peu partout.
On remplit une espèce de civière avec ce combustible, qui est hissé en haut pour le four.
On charge les ânes. Quelques briques tombent et se cassent. C'est normal.
Ces cariolles sont partout et servent à tous types de transports, même en ville.
Bien sûr, elles roulent à contresens sur l'autoroute. (En Inde on roule à gauche, mais en réalité chacun fait un peu comme il veut!)

Les nombreux panneaux de signalisation, les lignes blanches sur les routes, passages piétons et autres petites lumières derrière les véhicules ne sont que décoratifs ! La nuit quand les voitures se croisent on met "pleins feux" pour être sûrs d'être vus. En plus, on klaxonne toujours et partout, nuit et jour.

Voilà, Mr Singh a réussi à terminer de réparer le pneu, et nous pouvons repartir pour Agra. Il roule comme un fou, parce que nous sommes en retard et que le Taj Mahal ferme à 5 h. En Inde, quand on roule "normalement" c'est déjà de la folie, mais là ça devient de la folie furieuse ! Surtout quand il faut traverser Agra au milieu des embouteillages et des troupeaux de centaines de buffles énormes qui divaguent sur la chaussée en pleine ville, au milieu des tricycles, camions, et toute sortes de véhicules, sans compter les piétons complètement insouciants.

Ici nous passons la frontière entre le Rajasthan et l'Utar Pradesh.

Notez le garde-frontière qui fait la sieste, pieds nus, devant le bureau !

Les voitures à moteur n'ont pas le droit d'approcher du Taj Mahal. Mr Singh doit donc d'abord trouver le guide qui va m'accompagner, puis le cyclo-pousse qui devra s'approcher de la porte d'entrée "réservée aux touristes qui payent cher" !. Et l'heure tourne très vite. Le jeune guide parle un anglais incompréhensible. Je ne comprends pas un mot de ce qu'il dit, surtout dans le brouhaha de la circulation, et le pauvre cyclo-pousseur d'un âge canonique qui n'en peut plus de traïner mes 110 kg + le guide. C'est infernal. La ruelle est en travaux, on coule du béton, il faut descendre, payer, traverser les travaux en évitant de mettre les pieds dans le béton, puis se ruer vers l'entrée... Ouf, nous arrivons 5 minutes avant la fermeture de la billetterie ! Et, miracle, je découvre que le guide parle un espagnol parfait ! Je comprend tout ce qu'il dit et nous pouvons converser. La visite se fait donc en espagnol. Tout va bien.
Après la porte en bois et les fastidieuses, mais nécessaires, formalités de sécurité, voici la porte "Sud", qu'il faut traverser pour enfin arriver au célèbre monument.
Le voilà, magnifique, à la lumière d'une fin d'après-midi. Il vaut le voyage, et la conduite endiablée de Mr Singh pour arriver à l'heure.
Impossible d'éviter la traditionnelle photo que mon guide espagnol insiste de faire !
Le Taj Mahal fut édifié pour la 3e femme de Shah Jahan, Mumtaz, tragiquement décédée en 1631 en mettant au monde son 14e enfant. On prétend que le même monument, mais en marbre noir, devait être construit de l'autre côté du fleuve pour Shah Jahan lui-même, mais son fils le détrôna, l'emprisonna et arrêta les frais !
A gauche et à droite du Taj Mahal on trouve deux bâtiments identiques: une mosquée, et ici un pavillon pour les invités.
Non loin du Taj Mahal, voici le fort d'Agra, immense et massif, dont les douves remplies d'eau du fleuve étaient pleines de crocodiles ! C'est dans ce fort que finit emprisonné Shah Jahan.
Pour entrer, on passe d'abord sur le pont-levis, puis par une porte monumentale bien gardée. Chaque niche était autrefois décorée de splendides céramiques colorées.
On traverse une première cour très ouvragée.
A gauche, l'un des deux pavillons en marbre blanc et au toit "d'or" que Shah Jahan fit construire pour ses deux filles adorées. Quand les anglais attaquèrent le fort, ils s'emparèrent des plaques d'or du toit, "of course !". On commence à réparer et à consolider un peu l'édifice avant qu'il ne s'écroule. A droite et ci-dessous on nettoie le magnifique marbre sculpté pour lui rendre sa beauté d'origine. Shah Jahan adorait le marbre blanc, incrusté de pierres colorées précieuses. On rince à l'eau claire après avoir passé un mélange de terre, de céréales, de lait et de chaux (ancienne recette jadis utilisée par les femmes pour embellir leur peau). Tout le Taj Mahal a récemment été nettoyé de la sorte.
Sur la droite on voit encore les morceaux de plastique qui couvrent le "nettoyant miracle". Il faut qu'il agisse avant d'être rincé à l'eau (à gauche). Le résultat est spectaculaire.
Ssur une terrasse de marbre blanc, voici une fontaine ! Imaginez l'été par 40 degrés !
Appartement privé de Shah Jahan.
Son petit bassin personnel...
Simple détail du décor fastueux !

D'ailleurs, la tradition du marbre incrusté de pierres semi-précieuses continue à Agra. On peut acheter toute sortes d'objets décorés magnifiquement, fabriqués de façon artisannale.

Le trône taillé dans un seul énorme morceau de pierre noire venu de Belgique (!) y compris les pieds. Il est fendu, car les anglais attaquèrent le fort, et un gros boulet de canon tomba dessus.
A gauche c'est par là que le souverain recevait les dignitaires et les ambassadeurs, assis sur le fameux "trône du paon". Ce trône coûta aussi cher que tout le palais ! Tout en or, perles et pierres précieuses, il comprenait, entre autres pierres le célèbrissime diamant "Koh-i-Noor" que les anglais s'empressèrent de voler (plus tard) pour le ramener à Londres en 1850 où il fait maintenant partie des joyaux de la couronne, après avoir été retaillé ! Le trône avait été ramené à Delhi, nouvelle capitale, puis transporté en Iran en 1739 où il fut démantelé après l'assassinat de Nadir Shah. C'est bien compliqué toute cette histoire! Sans oublier qu'il était aussi passé par l'Afghanistan... L'Inde en demande sa restitution à Londres... L'Inde peut toujours attendre !

Shaj Jahan (mort en 1666) aimait le vin et les femmes ! Il avait 500 concubines, et la cour ci-dessus était pleine de vignes.

Partout il y a de très belles portes. Les pièces servaient à l'administration, aux nombreuses concubines ainsi qu'aux marchands, car les femmes n'avaient pas le droit de sortir du fort ! Le bazar était donc installé sur place. La magnifique porte de droite donne accès au "palais des miroirs". Elle est fermée au public, car les visiteurs arrachent le décor en souvenir (me dit le guide). Mais, moyennant 500 roupies (7 euros), le responsable peut exceptionnellement venir ouvrir le cadenas. Hélas, ce jour-là il était absent. Il faudra revenir. Ci-dessous voici la description du palais des miroirs.
Suite et fin:

Retour par le Kerala et le Tamil Nadu (au Sud de l'Inde)